Pas de relation entre gaucherie et efficience cognitive
Parce qu’il y a un débat de longue date sur de supposées moins bonnes performances chez les gauchers, nous avons étudié l’association entre les capacités cognitives et la préférence manuelle. Nous avons constaté qu’il n’y a aucune différence entre gauchers et droitiers, bien que les individus ayant une faible latéralisation manuelle et au moins un gaucher dans leur famille présentaient des performances légèrement inférieures (Mellet 2014).
80% des gauchers ont le langage piloté par l’hémisphère gauche, comme les droitiers
Dans une seconde étude, nous avons abordé une la question très débattue de l’existence d’une association entre la préférence manuelle et la latéralisation du langage. En effet, comme dans plus de 90% des cas le langage est piloté par l’hémisphère gauche et que plus de 90% des êtres humains sont droitiers, l’idée la plus répandue est qu’il existe une association entre les deux. Grâce au large échantillon de gauchers nous avons pu montré que l’association entre le côté de la main préférée et la force de la latéralisation hémisphérique pour le langage n’est pas significative (Mazoyer 2015). Fait important, nous avons également observé que les gauchers typiquement latéralisés à gauche au niveau hémisphérique sont identiques aux droitiers également au niveau des asymétries des régions du langage (Tzourio-Mazoyer 2016).
Nous avons également découvert des particularités de l’organisation du langage des gauchers très fortement gauchers pour l’usage de leur main dominante. Cette population héberge un petit groupe d’individus latéralisés à droite pour le langage (0,7 % de la population générale).
Cette description du large spectre de la variabilité de la latéralisation du langage chez les sujets sains nous a permis de rechercher des différences potentielles de connectivité intrinsèque en fonction du type de latéralisation des individus. Nous avons pu ainsi montrer qu’il existe une trace de la latéralisation du langage dans les réseaux du repos (Joliot 2016).
Il existe une association entre latéralisation du langage et de l’attention uniquement chez les personnes fortement gauchères
Un autre exemple des informations fournies par la BIL&GIN concerne les relations entre la latéralisation du langage et la latéralisation des réseaux de l’attention. Notamment, la question se pose de savoir si, chez le même individu, le fait d’être latéralisé dans l’hémisphère gauche pour le langage est en lien avec le fait d’être latéralisé à droite pour les fonctions attentionnelles visuo-spatiales. Certains auteurs proposent que les latéralisations cérébrales de ces deux fonctions ne sont pas associées (indépendantes l’une de l’autre), d’autres pensent, au contraire, que la latéralisation du langage dans un hémisphère est la cause de la latéralisation de l’attention dans l’autre hémisphère. Fait notable, les différentes études menant à ces deux différentes hypothèses incluaient diverses proportions de gauchers et de droitiers.
Nous avons donc testé l’hypothèse selon laquelle la SH complémentaire pourrait être différente chez les droitiers et les gauchers. Nous avons observé que l’augmentation de l’asymétrie fonctionnelle dans l’hémisphère gauche au cours de la production du langage est associée à une augmentation de l’asymétrie droite au cours d’une tâche d’attention visuo-spatiale, uniquement chez les sujets fortement gauchers. Ainsi, les gauchers qui utilisent exclusivement leur main gauche pour réaliser les gestes unimanuels de la vie quotidienne présentent une organisation cérébrale différente des autres sujets (droitiers ou gauchers moins latéralisé pour leur main). Ce résultat pourrait être le reflet d’une mise en place différente de SH au cours du développement en rapport avec des différences génétiques (Zago 2016).